Faire la paix avec nos émotions pour mieux accompagner celles de notre enfant

Lorsque l’on est parent on nous explique aujourd’hui (car oui, ce n’était pas forcément le cas il y a encore quelques années de cela) qu’il est bon d’accueillir et d’accompagner les émotions de l’enfant. Mais comment faire lorsque nous sommes en difficultés avec nos propres émotions ? En difficultés pour les connaitre et les reconnaître d’une part, encore plus pour les accueillir et les accepter de fait !
L’annonce d’une naissance, et encore plus la naissance elle-même, peut permettre de questionner cela. C’est donc le bon moment pour s’engager dans la réflexion et dans un travail qui permettrait d’accueillir et d’accompagner ces fameuses émotions de façon la pls sereine et sage qui soit.
Mais c’est quoi une émotion en fait ? Pourquoi peuvent-elles parfois nous mettre en difficultés ? Au contraire, s’il paraît si évident qu’il est important de les connaître et de les accueillir, alors pourquoi sommes tous et toutes (ou presque) en galère avec nos émotions ?  Quelles solutions existent pour nous permettre d’avancer sur le chemin d’un équilibre plus serein avec elles ? Comment faire la paix avec nos émotions en somme ?!
Nous allons tenter d’y répondre ou au moins d’engager une humble réflexion sur le sujet…
 

Émotions ? Vous avez bien dit… émotions ?

Il est souvent intéressant de se référer à la racine latine du mot comme base de définition. « Émotion » vient de « emovere » qui veut dire « hors de et susciter/mouvoir ». Donc nous pouvons dire qu’une émotion est une énergie qui se libère (ou qui a besoin de se libérer, de s’exprimer). Cette énergie naturelle est au service de la vie ; celle qui veut se conserver. Les émotions liées à la survie sont des émotions primales ou archaïques : l’attaque, la fuite, le mouvement, la peur et la colère. Les émotions liées à l’accomplissement et l’épanouissement de la vie sont la joie, l’enthousiasme, l’amour…
En règle générale, nous connaissons tous environs 6 émotions : la joie, la surprise, la tristesse, la peur, le dégoût et la colère ; mais il en existe beaucoup plus. Comme les couleurs, il y a les émotions primaires et les nuances. Elles sont interconnectées et plurielles (ne nous arrive-t-il pas de ressentir plusieurs émotions à la fois et parfois contraires ?) et en perpétuelle mouvement.
Qu’elles soient agréables ou désagréables, les émotions font intégralement partie de notre programme ou logiciel de base. Contrairement à d’autres « logiciels » qui vont être programmés tout au long de la vie et des expériences vécues, les émotions sont naturellement implantées dans notre cerveau dès les premiers instants de vie. 
Les émotions sont comme une boussole qui nous permettrait de nous orienter avec ce qui nous fait du bien, et qui naturellement nous attirent, et ce qui nous fait du mal, et qui naturellement nous repoussent. 
Comme sur un tableau de bord, elles pourraient représenter des lumières qui signalent nos besoins. Les émotions peuvent signaler un déséquilibre, un manque qui devrait nous permettre de faire les bons choix, de satisfaire nos besoins de survie (être) et de vie (bien-être). Avec tout ce dispositif hyper évolué (plusieurs milliers d’années de reprogrammation de l’espèce humaine permet tout de même à ce logiciel d’être performant), facile du coup de se repérer et de prendre les bonnes directions dans la vie ou de faire tout ce qu’il faut pour que notre machine psychique, émotionnelle et physique tourne bien !
 

Alors pourquoi sommes tous et toutes (ou presque) en galère avec nos émotions ? 

Souvent en tant qu’adulte, on nous a appris à gérer nos émotions…ou à les taire pour certaines parce que connoter négativement (la peur, la colère, la tristesse, etc.). Que veut dire gérer d’ailleurs ? Chacun peut « gérer » de façon très différente : certains réussissent à surfer sur les émotions, à suivre le mouvement des vagues émotionnelles qui les traverse. Lorsque les émotions surviennent, ils les accueillent et les laissent s’estomper pour laisser la place aux prochaines. Certains d’entre nous peuvent « gérer » leurs émotions par le contrôle (nous vivons dans une société qui prône et valorise le contrôle). Dans ce cas, nous allons poser des barrières, des digues qui empêchent les vagues d’émotions de déborder par crainte de ne plus rien contrôler. Le problème avec ce fonctionnement c’est que le jour où la succession de vagues est trop forte ou qu’une vague est plus grosse que d’habitude, à ce moment-là non seulement les émotions débordent malgré nos efforts pour les contenir mais elles peuvent carrément nous submerger, nous noyer. Par mécanisme de défense et parce que nous n’avons pas appris à surfer sur nos émotions ou parce que nous percevons un regard réprobateur de l’entourage si nous les laissons s’exprimer librement, parce que perdre le contrôle est « mal vue » (du moins c’est ce que nous pensons), nous avons tendance pour la fois suivante à vouloir renforcer nos digues, à jurer que nous nous laisserons plus avoir et en tentant de contenir plus ou d’être justement dans une posture d’attaque ou de fuite….
Plutôt que de les contenir ou de les contrôler, nous pouvons aussi faire le choix d’apprendre comment nous fonctionnons émotionnellement et comment accueillir ses mouvements naturels, comment les accompagner pour mieux les laisser s’estomper et laisser la place aux suivantes. Car ce qui est bien avec les émotions, c’est qu’elles sont différentes : elles peuvent être désagréables mais elles peuvent également être très agréables au contraire. Donc le meilleur moyen de laisser la place aux émotions agréables pourrait être de laisser exprimer et vivre nos émotions qui le sont moins, qu’en dites-vous ? 
C’est non seulement la méconnaissance de nos émotions mais l’idée reçue que l’on nous a transmis dès l’enfance, qu’il était bon de les contenir qui nous met en galère avec elles. 
En fonction que l’on soit un garçon ou une fille, notre éducation nous a transmis qu’il était bon de ressentir certaines émotions plutôt que d’autres ou suivant notre culture, notre milieu social, l’époque ou la société dans laquelle nous vivons.
 

Reprogrammer son logiciel de compréhension et de reconnaissance d’émotion

En fonction de nos expériences de vie et de l’influence de ses expériences sur nos émotions, nous avons appris de façon très différente les uns des autres à nous familiariser plus avec certaines émotions et au contraire à en rejeter ou brider d’autres. 
Lorsque que l’on est un garçon qui a grandi dans une famille où le mode d’éducation était plutôt patriarcal, où l’homme doit être fort physiquement et moralement, dominant… on nous apprends par exemple à contenir la tristesse, à ne pas l’exprimer, encore moins publiquement ; au contraire, on nous apprend à exprimer et extérioriser notre colère pour mieux dominer et ne pas se « laisser » dominer. Lorsque l’on est une fille qui grandit dans le même milieu, on aura tendance à être éduquée de façon à correspondre à ce modèle en s’adaptant à la colère de l’homme, en contrôlant justement notre propre colère et à exprimer notre tristesse pour mieux être consolée ou la peur pour être mieux protéger par l’homme justement. 
Lorsque l’on grandit dans un milieu hostile ou potentiellement dangereux, on va apprendre à l’enfant à contrôler la peur, à attaquer plutôt que de se défendre ou alors à privilégier la fuite pour éviter la confrontation. 

De fait, notre logiciel émotionnel de base est formaté par ceux qui possèdent le pouvoir de le faire dès notre plus jeune âge, en fonction de leur propre logiciel émotionnel et des idées reçues qu’ils ont intégrées, ou bien tout simplement par les expériences que nous vivons tout au long de la vie. 
Mais il est possible de se reconnecter à avec l’ensemble de nos émotions et de reprogrammer ce logiciel pour répondre plus facilement et plus naturellement à nos besoins fondamentaux. Armella Leung, auteure, illustratrice de la BD « émotions et mode d’emploi » fait référence à une forêt pour illustrer l’univers de nos émotions. Nous évoluons dans cette forêt où, par éducation et habitude, nous avons appris parfois à ne voir que du vert et du marron. Mais si nous souhaitons découvrir d’autres couleurs émotionnelles, il est possible de s’arrêter et de fixer plus d’attention à ce que nous avons envie de ressentir dans la vie.  De découvrir au fil des expériences, toutes les nuances de vert, de voir qu’il y a d’autres couleurs, d’autres formes, d’autres mouvements et que c’est ce tout qui rend la balade intéressante. Se mettre en situation de porter une attention particulière à certaine de ces couleurs, de s’émerveiller de ce qu’elles provoquent en nous, de se rendre compte à quel point elles nous font ressentir vivant et en cohérence avec nous-même, permet d’être en meilleure connexion avec nos besoins, de nous reconnecter avec notre logiciel primal. 
Ce qui nous apparaît comme étrange et difficile au début finit par être familier et indispensable au bout d’un certain temps. 
Il y a cependant des empêchements plus forts qui ne nous permettent pas aussi facilement de nous reconnecter avec l’ensemble de nos émotions. Certaines émotions peuvent être anesthésiées. C’est un phénomène naturel que l’on retrouve chez beaucoup de mammifères et qui permet de se protéger d’un effondrement psychique, de la souffrance qu’il entraîne, lorsque l’on est confrontée à un ou plusieurs traumatismes ou blessures émotionnelles. Dans ce cas, il est plus facile d’être accompagné et soutenu par un professionnel qui saura vous permettre de décrypter et dénouer ce qui empêchent d’avancer sereinement dans l’apprentissage ou la reconnexion de l’ensemble des émotions qui vous composent. Lorsque l’on se retrouve submergé, il est salvateur de trouver une bouée qui nous permet de remonter à la surface et de mieux appréhender les vagues suivantes. Il s’agit là non pas d’un aveu de faiblesse mais au contraire d’un acte de courage et de sagesse.
 

Quelles solutions existent pour nous permettre d’avancer sur le chemin d’un équilibre plus serein avec nos émotions ? Comment faire la paix avec nos émotions en somme ?!

Partant du principe que nos émotions représentent un logiciel de base, il semble nécessaire de le mettre à jour régulièrement. Nous pouvons nous dire qu’aujourd’hui, en 2022, la société dans laquelle nous vivons à évoluée positivement mais pas forcément les croyances et les idées reçues. Le modèle patriarcal établi à une époque où la notion de survie était dominante n’a plus d’utilité et encore moins de légitimité (si tenté qu’elle ait pu en avoir un jour !). La loi du plus fort n’a plus sa place dans les rapports entre individus. De fait, il est possible, voire encouragé de se libérer de ses croyances limitantes établies dans un contexte complètement différent, à une autre époque. Aujourd’hui, l’individu à la possibilité de vivre à travers ses besoins et ses choix, que l’on soit un homme ou une femme…la loi civile et pénale protège cette approche de ce qui pourrait l’empêcher, que l’on soit en accord moral avec cela ou pas. C’est souvent parce que cette libéralisation de l’expression de l’ensemble de nos émotions suscite des résistances ou des critiques, pour ne pas dire des attaques au sens propre comme au sens figuré, par notre entourage proche, qu’il est difficile pour certains d’entre nous de faire ce coming-out émotionnel. Comme pour d’autre choix naturel, il est nécessaire de se confronter parfois au regard et à l’avis réprobateur de certains membres de notre entourage pour se libérer des carcans dans lesquels nous nous trouvons. Pour s’engager sur le chemin, il est possible de repérer les résistances et ceux qui les activent mais aussi les leviers et ceux qui les permettent. Il y a dans chaque entourage des personnes qui se révèlent être des soutiens, des personnes qui attendent que quelqu’un d’autre exprime le même besoin pour s’engager sur le même chemin. Le meilleur moyen de le découvrir est d’exprimer ce que l’on souhaite que ce soit en rapport avec la connexion émotionnelle ou pour d’autres formes de libéralisations.

Il existe une multitude d’outils pour permettre de nous faire avancer sur le chemin d’un équilibre plus serein avec nos émotions. Il existe des livres, des documentaires. S’informer c’est déjà avancer sur ce chemin et encourager la mutation. Pour aller plus loin il y a des stages qui permettent d’apprendre à reconnaître et accueillir les émotions. ; avec une multitude d’approches et d’objectifs : apprendre au corps à digérer les émotions, apprendre à décrypter le besoin qui se cache derrière chaque émotion avec l’approche de la Communication Non Violente par exemple, en travaillant sur les croyances limitantes, avec la sophrologie, l’EFT (Emotional Freedom Technique), la méditation et exercices de respiration, etc.
Pour ceux qui ne le connaissent pas encore, il y a aussi le film d’animation Vice-Versa…il ne faut pas négliger les supports tel que celui-ci, notamment parce qu’il est possible de le regarder avec ses enfants et d’en échanger ensuite avec eux. Pour finir il y a le podcast qui se nomme « Emotions » chez Louie Média qui est très intéressant et que je recommande vivement pour tous ceux qui s’intéressent à ce sujet vaste et essentiel que représente l’Émotion.

Montrer à nos enfants que l’on accueille nos émotions est le meilleur moyen de leur apprendre à le faire.